DIMANCHE DES RAMEAUX ET DE LA PASSION 2020 ANNÉE A
Bien aimés de Dieu,
Contraints par un impératif de corona virus qui nous a imposé un isolement, du moins utile pour notre vie, nous ne pouvons pas célébrer en communauté le Mystère Pascal qui est le sommet de notre foi chrétienne.
Avec Fernand Boily et François Grenier, nous n’avons pas réussi à vous transmettre la célébration par le site Web de la paroisse. Nous sommes invités à suivre toutes les célébrations de la Semaine Sainte sur le site de notre Diocèse (voir les références dans le bulletin paroissial). Néanmoins, Je viens vous rejoindre dans votre confinement partager avec vous cette méditation du dimanche des rameaux.
Bonne Semaine Sainte et Joyeuse fête de Pâques chez vous.
Abbé L Abraham Mubikayi
I. ACCUEIL et MONITION.
Le Carême se termine. Pendant 40 jours, nous avons cheminé avec le Christ dans le désert de notre cœur pour apprendre de lui comment prier, comment faire pénitence et comment partager. Tout cela dans un élan sincère d’une conversion profonde et dans la préparation de notre coeur à la célébration du mystère pascal.
Ce fut l’essentiel de Carême.
Ce dimanche des rameaux nous introduit dans la semaine sainte. Sainte parce que c’est au cours de laquelle Jésus livre ses dernières cartouches de réserve qui lieront désormais le destin de l’humanité à sa Personne et à sa Mission :
– le don de l’Eucharistie et du Sacerdoce ministériel, – l’exemple de service qui déterminera toute l’action de l’Église, – le don libre de son Corps et de son Sang qui se terminera par la victoire de la Résurrection.
Cette célébration compte deux moments liturgiques importants: – L’Entrée triomphale de Jésus à Jérusalem accueilli comme Roi Messie de la lignée de David – et la Messe centrée sur sa Passions et sa Mort.
La liturgie de ce jour nous éclaire sur le drame de l’humanité, tiraillée d’une part par la vérité, la bonne foi, la gratitude, et d’autre part par la trahison, la calomnie, le mensonge et le mal. Entrons dans cette célébration avec les sentiments de gratitude pour le salut nous obtenu par le Christ et avec le sentiment de repentance pour notre péché qui continue à clouer Jésus sur la Croix.
II. Bénédiction des rameaux et lecture de l’évangile (prière de bénédiction.)
Mt 21, 1 -11.
Homélie
L’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem est un événement qui doit avoir marqué profondément la foi des premiers chrétiens pour qu’ils en gardent la mémoire à travers les siècles. Pour l’immortaliser, notre Mère-Église nous le fait revivre chaque année peu avant Pâques au dimanche des rameaux. À chaque messe on évoque cet évènement avant la grande prière eucharistique, utilisant les mêmes paroles chantées à Jérusalem (Sanctus…Hosanna, Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur…) ; l’Église nous encourage à conserver les rameaux dans nos maisons durant l’année à titre de rappel et pour les utiliser en cendres sur nos fronts le mercredi des cendres comme signe du début d’un nouveau cycle de Pâques. Ces faits devraient nous interpeller.
Il y a d’abord le caractère particulier de cet événement: Souvent on accueille un héros après sa victoire. Mais Jésus est accueilli par une foule en liesse alors qu’il se rendait à Jérusalem au lieu de supplice, vers le champ de bataille contre la mort.
Cette foule enthousiasmée c’étaient des gens en qui Jésus avait suscité l’espérance: ceux qui avaient mangé le pain et le poisson multipliés; qui avaient bien bu à Cana; les malades qu’il avait guéri de leurs maladies et parfois les membres de leurs familles; les apôtres; les disciples, les curieux…Les uns manifestant leur gratitude; les autres, espérant voir bientôt la libération du joug romain; Il y avait aussi d’autres disciples anonymes, qui ont préparé un âne pour la circonstance; probablement qu’ils cachaient leur identité à cause de leur statut social dans la société juive… C’est nous tous qui marchons avec lui pour lui manifester notre reconnaissance et faire avec lui le bout de chemin qui le sépare de son terminus terrestre où il va triompher de la mort en notre faveur…
Jésus lui, sur son âne avance en silence, reconnaissant les uns, saluant les autres de la main. Il connaît leurs coeurs: leur gratitude et leur bonne foi; il connaît aussi leur fragilité à se laisser manipuler et leur duplicité… il sait aussi que cette joie sera de courte durée. Mais lui doit aller jusqu’au bout, il doit accomplir sa mission; son ultime décision est prise: »Ma vie, nul ne la prend, c’est moi qui la donne ». Et pour cela, il avait besoin d’un âne que les amis ont mis à sa disposition. En célébrant cet événement la bonne question pour chacun de nous devra être celle-ci : » Qu’est-ce que moi je mets à la disposition de Jésus et de son Église pour leur faciliter leur Mission ? Qu’est que je mets à sa disposition pour que son amour, sa miséricorde, son pardon… parviennent à toucher les coeurs blessés et meurtris pour faire renaitre en eux la foi et l’espérance?
Le Christ n’avait pas besoin d’un Char Royal pour ce trajet…chacun peut trouver son âne si petit soit-il; mais le donner à coeur joyeux pour la Mission.
III. LA PASSION DE NOTRE SEIGNEUR JÉSUS CHRIST SELON SAINT MATTHIEU 26,14–27,66
Homélie
Après l’écoute attentive de cet évangile, faudrait-il appeler ce récit: »La Passion de Jésus ou l’Amour passionné de Jésus? Parce qu’en Lui on trouve mêlés simultanément l’amour fou de Dieu et l’Amour fou de l’humanité. Voilà ce qui le conduit tête haute au-devant de la mort. À travers cet évangile on comprend que Jésus s’est attaqué à la dynamique même de la mort en faisant sauter les verrous du péché qui en sont la cause. Et il est le seul capable de le faire. Plus tard Saint Pierre témoignera: »Il n’y a de salut en aucun autre; car il n’y a sous le ciel aucun nom qui ait été donné parmi les hommes par lequel nous devions être sauvés » Ac4,12
Jésus est condamné à mort. Mais cet évangile ne nous montre pas avec netteté qui l’a condamné à mort. On l’a envoyé d’un tribunal à l’autre. Aucun juge n’a osé prononcer une sentence contre lui; l’affaire était trop délicate, les motifs d’accusation trop vagues et les preuves insuffisantes. Pilate, le dernier d’entre eux s’est lavé les mains publiquement en déclinant toute responsabilité: »Vous-mêmes, faites de lui ce que vous voulez ». C’est votre affaire.
De la foule qui a crié à pleine gorge »crucifie-le, crucifie-le »; personne en rentrant chez lui n’a pu dire » Je viens de condamner un homme à mort ». On ne sait pas qui l’a condamné à mort parce que c’est le péché des humains de tous les temps qui l’ont condamné et qui le condamnent à mort.
C’est embêtant, et c’est même très embêtant ce récit de la Passion de Jésus où la majorité des acteurs jouent un mauvais rôle. Autour de Jésus s’est développé une animosité qui devient graduellement de la violence aveugle et de plus en plus contagieuse. D’abord de la haine des grands prêtres qui s’étend à tout le peuple pour se transformer en un seul cri: Crucifie-le.
Tous, ceux qui connaissent et ceux qui ignorent; ceux qui exercent l’autorité et ceux qui exécutent les ordres, et même les curieux passants… Les uns ne se distinguant pas des autres entrent tous dans le péché chacun à son rang.
- le péché pour les chefs des prêtres et les pharisiens devient la haine, le complot qui conduit au meurtre d’un innocent.
- il conduit la foule à l’ingratitude; elle qui avait bénéficié de la bonté de cet homme dans leurs situations difficiles.
- il conduit les apôtres au sommeil, à la peur, et pour le comble à la trahison de Judas et au reniement de Pierre.
- il conduit les soldats à entrer dans le mal par participation.
- il conduit Caïphe à rendre un jugement injuste et à Pilate à jouer à l’innocent…
En conscience nous pouvons nous retrouver dans toutes ces catégories. Et Jésus meurt pour nous délivrer de notre péché et nous inviter à devenir aussi comme:
– ces amis qui lui prêtent un âne pour l’aider à accomplir sa mission. (notre temps, notre énergie, notre sens d’écoute…
– ces femmes au coeur maternel et compatissant qui l’ont suivi de Galilée jusqu’aux pieds de la Croix. (compassion et fidélité
– Simon de Cyrène qui porte la croix de Jésus l’aidant à souffler. (notre entraide, notre support des plus faibles…
– Joseph d’Arimathée qui demande le Corps de Jésus pour la sépulture.
– ce centurion romain qui professe sa foi à partir de ce qu’il a vu: »Cet homme était vraiment le Fils de Dieu »
Ce que vous ferez à ces plus petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous le faites » dit Jésus.
Face à cette ambiguïté du coeur de l’homme, Jésus reste le seul qui aime vraiment et qui aimera jusqu’au bout.
Il reste celui qui pose sur chacun un regard d’amour; et un regard qui invite chacun à se repentir et à vivre de l’amour, par l’amour et dans l’amour. C’est le regard de Dieu; celui de la miséricorde.
Ce regard d’amour pénètre Pierre et déclenche en lui la conversion. Il pleure son reniement et il pleure beaucoup. C’est à cela que nous sommes tous invités. « N’aie pas peur, laisse-toi regarder par le Christ; laisse-toi regarder car Il t’aime »(chant)